Il faisait tout noir dehors, j'attendais le bus, je marchais, j'avançais sans vraiment savoir où j'allais, si loin. Il n'y avait pas beaucoup de voitures, pourtant il n'était pas si tard, les lampadaires éclairaient la grande avenue et mon visage gondolé, mouillé, égaré. Parfois, je marchais dans la voie pour bus, le trottoir était trop petit, j'avais les yeux qui me brûlaient, je peinais à voir vraiment où je mettais les pied, trop de brume noircissait le chemin. Trois garçons sont passés à côté de moi avec une bière, ils ne parlaient pas français, m'ont regardé, ils ont explosé de rires. Qu'avais-je donc de si amusant? Je marchais lourdement, titubant d'un côté, puis de l'autre. Mon manteau était grand ouvert, la gorge à l'air, j'avais au moins chaud aux pieds, dans mes bottines marrons fourrées. Je n'avais pas de mouchoir, je reniflais nerveusement, je marchais, sans savoir où aller. Je suis arrivée près de la Boulangerie. J'entendais des talons claquer sur le sol clac clac clac clac sur le bitume du boulevard, une fille avec un chapeau noir en jupe courrait sur la route, ses cheveux partaient dans tous les sens, elle se retournait sans cesse. J'ai vu au loin deux gros phares jaunes fendre le brouillard. Elle s'élançait vers l'arrêt de bus. Je me suis arrêtée, il n'y avait personne. J'ai levé le doigt, le bus s'est arrêté, il l'a attendu elle est montée. Même pas un regard ni un merci. J'aurais dû la laisser louper le dernier bus et rentrer à pied dans la nuit noire.
Je te fais de gros bisous, en tout cas ton geste était joli :)